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Les labyrinthes de la vie
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21 décembre 2019

El Che (15)

Je suis un peu fatigué d’écrire… Marre… C’est… C’est fatiguant à la fin, des crampes dans les doigts. J’aimerais bien arrêter, mais comment faire ? Fallait pas se lancer dans une entreprise pareille. désespérant…

Un rayon de soleil se pose sur ma feuille essayant d’effacer les lettres comme s’il voulait m’empêcher d’écrire comme si ça le concernait, le mettait en cause. D’ailleurs c’est sûr, ce rayon n’est plus tout à fait le même depuis que j’en parle, ce n’est plus un rayon de soleil, c’est mon rayon de soleil, le rayon de soleil qui se pose sur ma feuille essayant d’effacer les lettres comme s’il voulait m’empêcher d’écrire. Ce n’est pas celui qui plane au-dessus de la rue de la Rovère (un cardinal je crois…), mais celui-là aussi est maintenant différent… Celui qui se pose sur ma feuille essayant d’effacer les lettres comme s’il voulait m’empêcher d’écrire, je le tiens… Il glisse entre mes doigts mais je le fixe sur la feuille, le plaque, le cloue avec mes mots, là, pour toujours (du moins pour un certain temps), je le retrouverai quand je voudrai, aussi souvent que je voudrai, toujours le même rayon de soleil de juin, d’un jeudi de juin, de dix heures du matin.

C’est drôle. C’est un peu con, mais c’est drôle. Faudra bien qu’il s’y fasse. Un rayon de soleil ne sait pas qu’il peut être dompté — un rayon de soleil ne sait rien, il se contente d’être. Aussi, moi, je peux en faire ce que je veux, en faire ma chose, mon rayon de soleil qui se pose sur ma feuille essayant d’effacer les lettres comme s’il voulait m’empêcher d’écrire. Je suis libre, libre de faire ce que je veux, même l’amour… D’ailleurs je l’ai fait une fois, avec la nièce de la bonne. Assez agréable, mais elle ne me plaisait pas assez pour que je continue notre relation. C’est une gamine. Bonnafoux m’a dit que j’avais tort. Il aurait bien pris ma place. Je m’en fous. Je fais ce que je veux. Tant que je reste là, je fais ce que je veux. Ailleurs c’est différent, mais là, oui, je suis libre, maître de mon monde, j’emmerde tout le monde, je dirige le jeu.

Bien sûr, il y a aussi la vie des autres : la cour de la gendarmerie par exemple où s’affairent des silhouettes bleues et le fourgon qu’ils sortent d’un garage puis qui part sur la route de Badaroux et que je peux suivre jusqu’au couvent de la Miséricorde, dans la vallée, sous le château… Mais tant que je suis là, à mon poste, c’est moi le maître ; je peux ou je peux ne pas parler d’eux, leur donner une autre durée, les faire intervenir dans un autre monde. Si je descends, c’est autre chose… C’est comme pour le soleil, son existence et ses effets dépend de l’endroit où l’on se place. Le Che, c’est pareil. Faut voir… Faut pas se laisser avoir par les autres, ceux d’en bas.

Mais je m’égare. Je m’égare même sacrément. Aussi, quelle idée d’entrer dans la ville ? Fallait décrire le monde que je vois. Un point c’est tout. C’est bien assez compliqué comme ça ! Je manque de méthode — père me le dit toujours — mais je crois qu’il n’y a rien à faire, dès que je ne bride pas ma pensée, elle s’égare, batifole, papillonne ici ou là. C’est d’ailleurs ce que disent les profs de maths ou de sciences nat, ou d’autres encore, je ne sais plus trop qui. Faudrait vérifier sur mes bulletins trimestriels. Mère a dû conserver ça quelque part. Plus tard… Si j’ai le temps…

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